Le voile noir, d’Anny Duperey

Quand on pense à Anny Duperey (moi, en tout cas), on visualise en général davantage la comédienne que l’écrivaine.

Actrice de théâtre avant tout, cette femme élégante, dont le timbre de voix particulier est immédiatement reconnaissable, s’est illustrée également sur petit et grand écran. On citera notamment ses rôles emblématiques dans « Une famille formidable », tenu pendant plus de 25 ans, ou le film inoubliable « Un éléphant ça trompe énormément » aux côtés des regrettés Jean Rochefort, Claude Brasseur, Victor Lanoux et Guy Bedos.

« Le voile noir » tient davantage de l’autobiographie que du roman. Publié en en 1992, il connut un immense succès à l’époque. Pour ma part, c’est d’abord le format qui m’a attirée : l’ouvrage pourrait être classé dans la catégorie « Beaux livres », puisqu’il contient de nombreuses photographies en noir et blanc choisies dans la vaste collection de son père, Lucien Legras.

Je suis particulièrement sensible au charme du Noir et Blanc, et grande admiratrice notamment du photographe Izis, dont le « Paris des Rêves » m’emporte à chaque page. Les photos du père d’Anny m’émeuvent. Elles ont la perfection de l’éphémère capturé au juste moment, et y transparaît l’indéfinissable talent qui différencie l’artiste du « photographe du dimanche ».

S’il avait vécu, il ne fait aucun doute que Lucien Legras aurait eu une magnifique carrière. Le destin en a malheureusement décidé autrement et c’est de ce drame, la mort de ses parents fauchés en pleine jeunesse, que nous parle Anny Duperrey. Elle avait 8 ans et, des années d’avant, elle n’a conservé aucun souvenir, comme « un voile noir » jeté sur sa mémoire meurtrie.

Les photos, disais-je, m’ont émue, mais la plume m’a touchée en plein cœur. Pétri d’émotion et de mélancolie, évitant l’écueil du pathos, le texte se veut universel, le cri d’amour d’une femme encore sous le choc, tant d’années après. Moments de vie, bribes de souvenirs de cette existence d’après, « le voile noir » est le récit pudique d’une lente reconstruction, une introspection touchante et superbement écrite.

Malgré la tristesse évidente qui s’en dégage, j’ai beaucoup aimé ce récit et les photos qui l’illustrent, et je compte bien poursuivre mon exploration de l’œuvre de l’auteure.

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