Les Inexistants : origines d’un roman noir

Lors des rencontres en librairie ou en salon du livre, on me demande très souvent d’où me vient mon inspiration.

Quelle est l’histoire de ce roman, de quel processus intellectuel et créatif est-il né ? Il est toujours difficile de répondre avec précision à cette question. Une histoire ne naît pas « ex nihilo », à partir de rien et, d’une seconde à l’autre, livrée clé en main avec son intrigue complète, ses personnages fouillés et les messages que je souhaite y glisser.

Ce serait trop beau !

Au contraire, en ce qui me concerne toutefois, le roman prend forme d’une façon très progressive, par petites touches qui, peu à peu, s’affinent jusqu’à obtenir un ensemble cohérent (ou pas, d’ailleurs ! Petite pensée pour toutes les histoires mort-nées attendant leur heure hypothétique dans les profondeurs de mon disque dur)

Parlons du genre, pour commencer.

Certains auteurs écrivent dans un genre bien défini : romance, thriller, fantasy… Ils ont un univers, un type d’écriture et un lectorat fidèle qui attend de retrouver, dans chaque nouveau roman, les émotions qui les ont tant fait vibrer dans les précédents.

L’avantage est justement de se constituer livre après livre une communauté de lectrices et de lecteurs fidèles, prêts à acquérir les yeux fermés le nouvel opus de leur auteur-chouchou dès sa sortie avec la certitude qu’il leur plaira… Une zone de confort dont l’inconvénient pour l’écrivain est, justement, le risque de s’y laisser enfermer, et de se voir « condamné » à écrire éternellement le même livre, celui que les lecteurs attendent.

Pour ma part, j’aime explorer différents genres, différentes thématiques. Si vous me suivez depuis mes débuts, vous savez que j’ai écrit des sagas familiales, des romans noirs psychologiques ou des histoires fantastiques, dans mes parutions les plus récentes.

En tant que lectrice, j’aime varier mes lectures, et il en est de même quand j’écris.

Comment sont nés les inexistants ?

En 2017, je venais de terminer l’écriture du Cas singulier de Benjamin T. Après cette histoire qui, sans être totalement inscrite dans le genre fantastique, avait pour thèmes voyage dans le temps et vies antérieures, j’avais envie de revenir au réel.

Après l’héroïsme de Benjamin et de ses compagnons de résistance, je voulais travailler des personnages plus ordinaires et bâtir une intrigue plus minimaliste, dans un cadre moins spectaculaire, plus intime.

Je ne saurais pas dire si mes choix l’ont été en réaction consciente à l’univers du Cas singulier, que j’avais par ailleurs pris énormément de plaisir à écrire. Mais, avec le recul, le contraste entre les deux romans me saute aux yeux.

Une histoire, c’est avant tout une ambiance.

Pour Les inexistants, si je ne devais citer qu’une source d’inspiration, ce serait le célèbre tableau d’Edward Hopper, Nighthawkes.

La mélancolie désabusée qui se dégage de l’œuvre du peintre américain me touche particulièrement dans cette toile.

La solitude des clients accoudés au bar, le dénuement du décor avec, paradoxale, l’exposition presque indécente de ces vies figées dans une sorte de désespoir contrôlé, à travers les immenses baies vitrées…

La saisissante lumière du bar, criarde, agressive, contrastant avec le clair-obscur de la rue étrangement déserte…

Une ambiance de fin du monde…

… de temps suspendu que l’on retrouve aussi dans certaines œuvres du maître de l’horreur et du fantastique, Stephen King. Je pense particulièrement à la novella Brume (tirée du recueil éponyme et portée à l’écran sous-forme de mini-série, The Myst) ou au film Maximum overdrive dont King a écrit le scénario.

Quel point commun entre ces deux histoires (et avec Les Inexistants) ?

Dans les deux oeuvres de King, il s’agit d’une petite poignée de personnages ordinaires qui se retrouvent coincés ensemble, dans un lieu neutre et d’habitude public, à la suite d’une catastrophe. Qu’il s’agisse d’un centre commercial (Brume) ou d’une station-essence (Maximum overdrive), dans les deux cas, l’intérêt réside dans les liens qui se tissent entre les protagonistes, nécessairement passionnés, dans une situation de crise totalement inattendue.

Aucune catastrophe planétaire n’a contraint mes trois héros à s’enfermer ensemble dans le restaurant de bord d’autoroute « Le Péché Gourmand ». Néanmoins, dans « Les Inexistants », j’ai voulu recréer le même type d’atmosphère, l’impression d’une menace omniprésente dès les premières pages, susceptible de s’abattre sur eux dès qu’ils quitteront leur havre sécurisant.

Vous l’aurez compris, c’est donc bien d’un huis-clos qu’il s’agit.

Je vous avais prévenus, on est aux antipodes des voyages réels ou fictifs de mes romans précédents ! Et, pour aller au bout de cette envie de circonscrire l’intrigue, j’ai emprunté aux fondamentaux du théâtre classique la fameuse « Règle des trois unités ».

Qu’en un jour, qu’en un lieu, un seul fait accompli

Tienne jusqu’à la fin le théâtre rempli.

Boileau (1674) dans L’Art Poétique

Unité de lieu, je l’ai dit, avec pour cadre « Le Péché Gourmand », petit restaurant ouvert jour et nuit, où officie Camille.

Unité de temps, puisque l’intrigue se déroule au cours d’une seule nuit, les chapitres du roman découpés heure par heure pour une avancée en temps réel.

Unité d’action, que l’on pourrait, je pense, résumer en une seule phrase : « Lequel des trois est coupable ? »


Cette « mise en bouche » vous a-t-elle plu ?

N’hésitez pas à me donner vos impressions en commentaire et à partager !

Dans le prochain article, je vous parlerai plus en détail des personnages des « Inexistants ».

Si ce n’est déjà fait, pensez à vous abonner à ma Newsletter pour ne rien rater.

En cadeau, vous recevrez ma nouvelle gratuite, « Hassan », qui vous plongera un peu plus dans l’ambiance du roman…


A lire également