Petite, d’Edward Carey
Chronique d’une petite merveille !
Ce roman, que j’ai choisi tout à fait au hasard à la bibliothèque, est un sacré pavé : 570 pages que j’ai dévorées avec un très grand plaisir en une petite semaine, sans jamais trouver le temps long.
L’auteur, qui a tout de même mis quinze ans à écrire son livre, nous entraîne sur les pas de Marie Grosholz. Née à Strasbourg en 1761, la fillette au visage particulièrement ingrat et dont la taille inférieure à la norme lui vaudra le surnom plus dévalorisant qu’affectueux de « Petite », connaîtra cependant un destin extraordinaire. En Suisse, sa mère et elle entrent au service du Dr Curtius, un médecin méprisé par ses pairs, paranoïaque et vivant en reclus. Sa maison abrite un étonnant « cabinet de curiosités » composé d’organes humains de toutes sortes, dont il moule les formes pour les conserver.
Un peu malgré lui, il va initier la jeune Marie, sa servante, à son art singulier.
Ensemble, ils vont adapter la technique à une nouvelle activité : mouler des têtes, pour en conserver les traits dans un masque de cire et permettre, à cette époque où ni la photographie ni le cinéma n’ont évidemment été inventés, d’en garder le souvenir au-delà de la mort.
Cette étonnante occupation conduira Marie à croiser nombre de personnages illustres de son temps, Voltaire, Benjamin Franklin, mais aussi Louis XVI ou Napoléon Bonaparte… Avec elle, le lecteur découvrira Versailles au temps de sa splendeur, puis la Révolution française et ses horreurs, la Grande Histoire côtoyant le quotidien de l’héroïne, aussi inattendu que fascinant.
Mêlant habilement faits et personnages réels à la fiction, Edward Carey brosse le portrait d’une époque à travers le regard sans concession de Petite, la femme qui deviendra plus tard Madame Tussaud.
Elle fondera à Londres le musée du même nom, équivalent britannique du musée Grévin parisien.
Ultime originalité, le roman est émaillé de délicieuses illustrations en noir et blanc de l’auteur, venant très plaisamment agrémenter la lecture.